Route Nationale 10 - De Paris à Biarritz
Comme la plupart des grandes voies de communication en Europe, la route nationale 10 trouve son origine dans l'Antiquité. Les Gaulois y ont tracé les premiers chemins pour permettre aux différentes tribus de communiquer entre elles. La plupart de ces voies gauloises ont été reprises par les Romains afin de faciliter le passage des légions vers les Gaulois récalcitrants. À partir du 10e siècle, d'innombrables pèlerins ont emprunté ce chemin lors de leur voyage vers Saint-Jacques-de-Compostelle. La "Via Turonensis" était la liaison la plus utilisée par les pèlerins entre le nord de la France, la Hollande et l'Angleterre et l'Espagne.
En 1464, Louis XI décréta une loi qui posa la première pierre de l'établissement de relais de poste réguliers. Ceux-ci étaient installés dans un rayon de 15 kilomètres et permettaient aux cavaliers de changer de cheval et de parcourir ainsi 90 kilomètres par jour. La ligne Paris-Bordeaux-Espagne a été l'une des premières routes royales à être dotée d'une route postale complète dans la première moitié du XVIIe siècle. Des auberges ont été construites pour rendre le voyage le plus agréable possible.

En 1891, la première course cycliste Bordeaux-Paris a eu lieu sur cette route et est devenue l'une des grandes classiques cyclistes en France. En 1895, la première grande course automobile eut lieu sur la route nationale 10. La course Paris-Bordeaux-Paris fut remportée par un pilote grâce à la supériorité des pneus démontables des frères MICHELIN. Avec l'augmentation constante du trafic automobile, la chaussée fut peu à peu asphaltée et des garages automobiles, des stations-service, des cafés, des hôtels et des restaurants s'installèrent en bordure de la Route Nationale 10.
À la fin des années 60, la France connaît une période de croissance et de prospérité exceptionnelles. L'automobile fait son entrée dans les familles françaises. Les congés annuels payés sont introduits et suscitent le désir de passer ses vacances dans les Pyrénées, au bord de l'Atlantique ou en Espagne. A l'époque, un voyage de cinq cents kilomètres sur la RN10 s'apparentait à une expédition au bout du monde. Mais, la Route Nationale 10 est devenue une route de vacances ! Et en été, la route des travailleurs immigrés venus d'Espagne, du Portugal, d'Algérie et du Maroc.

Un Monsieur Laurent Laine se souvient sur son site Internet : "La veille du départ, nous, les enfants, devions nous coucher tôt pour pouvoir partir frais et dispos, après avoir chargé le coffre et la banquette arrière de la voiture. Il ne restait que peu de place pour ma sœur et moi. Nous sommes restés assis pendant des heures, coincés entre des bagages. Il y avait 500 km et la route était presque exclusivement à deux voies, rarement à trois voies, et devenait meurtrière en raison de possibles collisions frontales. Les automobilistes des deux côtés, impatients de doubler, risquaient de se percuter de plein fouet. Il fallait presque une journée entière pour parcourir cette distance. Il y avait certes moins de voitures qu'aujourd'hui, mais l'état des routes provoquait des embouteillages et des ralentissements interminables. Je me souviens que nous nous arrêtions souvent en plein champ et que les automobilistes se mettaient sur le bas-côté pour se dégourdir les jambes. Sur le parcours, il y avait des embouteillages historiques comme à Vendôme sur son pont couvert, à Montbazon ou à Sainte-Maure-de-Touraine".

Une rose des vents sur le parvis de la cathédrale Notre-Dame-de-Paris est l'origine symbolique de la route nationale 10. C'est ici, au point zéro du réseau routier français, que commence mon voyage jusqu'à l'Espagne, loin au sud.

J'essaie de suivre au mieux l'ancienne Route Nationale 10 à l'aide d'une carte routière Michelin de 1963. Malheureusement, le tracé actuel diffère en partie considérablement de celui de l'époque. Et c'est justement là que réside l'intérêt de mes voyages sur les anciennes routes nationales de France. Trouver d'anciens tronçons, chercher des stations-service abandonnées, rencontrer des gens qui connaissent encore l'"ancienne" N10. Et se réjouir lorsqu'on découvre un ancien panneau indicateur !
Je quitte Paris par la porte de Saint-Cloud, de bonne humeur, sur le "boulevard périphérique", l'autoroute urbaine qui entoure Paris, et m'engage sur la route nationale 10. C'est parti ! Je me réjouis de mon voyage. Direction l'Atlantique et l'Espagne.

La circulation est également dense cet après-midi, le premier embouteillage ne se fait pas attendre. Ce voyage ne peut pas commencer de manière plus authentique. Dans les années 1960 et 1970, se rendre dans le sud était toujours synonyme d'embouteillages, d'attente et, malheureusement, de nombreux, très nombreux accidents.
Entre les nouveaux bâtiments et les centres commerciaux, quatre voies mènent à la périphérie proche de la capitale. Moche, pratique pour le consommateur, mais terriblement ennuyeux pour moi.
Le château de Versailles est grandiose. Et totalement envahi. Je suis ici un samedi et bien que j'aie pris la précaution de me procurer un billet d'entrée sur Internet, je dois attendre dans une longue file avant d'être admise. Ensuite, un contrôle de sécurité complet... et me voilà dans le château, avec un million d'autres visiteurs. Le contrôle de sécurité n'a pas été aussi rapide pour moi, car je dois me séparer progressivement de mon porte-monnaie, de mon trousseau de clés et de la batterie de rechange pour l'appareil photo dans les poches de ma veste. L'appareil de contrôle n'arrête pas de biper. Après coup, je ne comprends pas pourquoi il ne se déclenche pas pour la clé de rechange que je porte à la ceinture.



Le château de Versailles, qui était à l'origine un pavillon de chasse royal, a tellement plu à la famille royale que le roi Louis XIV a fait déménager la cour royale de Paris à Versailles. Pendant des décennies, la famille royale française continua à embellir le château et à régner depuis Versailles. Ce n'est qu'avec la Révolution française que la cour fut contrainte de revenir à Paris.
Aujourd'hui, le château est l'un des symboles les plus admirés et visités de France. Chaque année, on estime que 5 millions de personnes visitent le château de Versailles et entre 8 et 10 millions les jardins. Avec plus de 2.300 pièces réparties sur 63.154 mètres carrés, le château abrite plus de cinq siècles d'histoire française.
Le point culminant historique du château est la signature de l'un des traités de paix les plus importants - le traité de Versailles, qui a mis fin à la Première Guerre mondiale.



La RN10 contourne le château de Versailles jusqu'à ce qu'elle bifurque brusquement vers le sud après Trappes (jusqu'ici, elle cohabite avec la Route Nationale 12 qui mène en Bretagne). Les premières rangées d'arbres transforment la route en une allée jusqu'à ce qu'elle entre dans la forêt de Rambouillet, ancien terrain de chasse des rois de Versailles.
L'attraction principale de Rambouillet est son château du 14ème siècle, sinon la petite ville n'a pas grand chose à offrir. Et ceux qui, comme moi, viennent de Versailles sont gâtés. Malgré tout, le petit château de Rambouillet vaut la peine d'être vu. Les dépendances du château accueillent des hôtes de marque en visite en France.



Après Rambouillet, la Route Nationale 10 suit le pittoresque Val de la Gudville, bordé d'une allée qui rappelle son ancien statut de route royale. Quelques hameaux sont rapidement passés et j'arrive déjà à Saint-Symphorien-le-Château. C'est ici que se croisent la RN10 et la "Voie de la Liberté". Il s'agit d'un itinéraire historique imaginaire à travers le nord de la France, le Luxembourg et la Belgique, qui retrace le chemin de la libération par les Alliés après le D-Day à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Elle s'étend sur 1446 km et chaque kilomètre est marqué par une pierre commémorative.

La RN10 mène maintenant à Chartres sur trois voies. Toujours en alternance deux voies dans un sens et une voie en sens inverse, séparées par une ligne continue. Jusqu'au début des années 1980, il en allait autrement. La voie centrale des trois voies était ouverte aux deux sens de circulation. Et on avait le droit de dépasser dans les deux sens ... à condition qu'il n'y ait pas de trafic en sens inverse. De nombreux accidents, parfois graves, étaient à déplorer, car on restait à tout prix le plus longtemps possible sur la voie du milieu. Un vrai casse-tête.
Chartres est célèbre pour sa cathédrale Notre-Dame, inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO. C'est l'une des plus grandes cathédrales gothiques de France. Sa façade est ornée de milliers de sculptures qui ont survécu à la Révolution française sans être endommagées.


Dans la vieille ville de Chartres, on peut admirer de nombreuses maisons anciennes datant du 16e siècle. Une promenade dans l'ancien quartier des tanneurs le long de l'Eure, avec ses ponts et ses passerelles, est très charmante. Les ruelles secondaires sont encore plus intéressantes. Là où les autochtones vivent et font leurs courses, où les chats et les enfants courent. Là où, à part moi, plus aucun touriste ne s'égare aujourd'hui.


Entre Chartres et Bonneval, la RN10 est encore très originale. Elle mène tout droit vers le sud sur deux voies. Des champs de céréales à perte de vue et des prairies verdoyantes d'un magnifique vert printanier m'accompagnent. Je traverse de petits hameaux et villages, comme à l'époque, la route passe au milieu des localités. Il y a peu de circulation, car celle-ci s'est déplacée vers l'autoroute à péage A10. Pour le plus grand plaisir des riverains.

Et puis j'arrive à Bonneval. Une petite ville française au milieu de nulle part, dont on tombe immédiatement amoureux. On l'appelle aussi la Venise de la Beauce. De belles maisons se reflètent dans le Loir, et ceux qui le souhaitent peuvent même faire un petit tour en barque sur la petite rivière.
Je flâne sans but dans la petite ville, bois un pastis dans une brasserie et laisse la France s'imprégner en moi. Oh, comme j'aime être assise ici ! Tant de souvenirs me reviennent... Routes Nationales, Gauloises, Marchés, Pernot. Des odeurs, des bruits, des bribes de voix. Art de vivre !


L'attraction principale est toutefois l'abbaye de Bonneval. Elle a été en grande partie détruite pendant la révolution, mais la porte d'entrée fortifiée et une magnifique maison monastique du 15ème siècle ont été conservées. Oui, j'ai vu le panneau "Accès interdit", mais je voulais juste jeter un coup d'œil à travers l'arc de la porte... et voilà qu'une jeune femme se précipite vers moi depuis la loge du gardien et m'explique très clairement ce que signifie le panneau. Ouf, elle est sévère. Elle est sans doute aussi énervée parce que le bâtiment abrite aujourd'hui un hôpital psychiatrique et que les contacts avec l'extérieur sont interdits.


Du milieu du 19ème siècle jusqu'en 1967, la route nationale 10 traversait Bonneval par la longue rue de Varize, qui était régulièrement engorgée. Ce n'est que depuis 2007 que la ville est désengorgée par une large route de contournement.
Surplombant le Loir, le château de Châteaudun allie une architecture médiévale, gothique et Renaissance. La petite ville elle-même possède encore quelques ruelles médiévales pavées avec de vieilles maisons à colombages dans la vieille ville pittoresque.



Quelques panneaux publicitaires peints, de petits garages, d'anciennes stations-service abandonnées et des restaurants fermés à jamais témoignent de l'âge d'or de la rue des années 1950 aux années 1970. La plupart de ces commerces ne se sont jamais remis de l'ouverture de l'autoroute A10 entre Tours et Paris en 1973.

Entre les deux villes de Châteaudun et de Vendôme, le paysage change peu à peu. La plaine de Beauce laisse lentement place à des vallées et des collines douces et la route nationale 10 suit désormais le Loir de manière continue.

Vendôme était un goulet d'étranglement bien connu sur la N10. Arrivé au centre de la ville, il fallait se faufiler dans des ruelles médiévales et traverser deux bras du Loir sur des ponts étroits. Mais le pire restait à venir : le passage par la Porte Saint-Georges et toute la colère entre les automobilistes-mobilistes et les piétons. Un seul véhicule à la fois était autorisé à circuler sur la nouvelle route. La priorité était donnée à ceux qui sortaient de la ville et tentaient de désengorger. Un panneau d'information rédigé en quatre langues mettait en garde contre ce passage délicat. Le contournement de Vendôme a finalement apporté un grand soulagement en supprimant l'un des embouteillages les plus connus de France.



Après la traversée autrefois pénible de Vendôme, nous continuons vers Tours sur une longue ligne droite assez monotone. La vallée de la Loire n'est plus qu'à quelques kilomètres, la douceur du climat et le calme du paysage se font de plus en plus ressentir.

J'arrive à Tours, la troisième ville après Paris et Bordeaux dans mon périple le long de la RN10. La Route Nationale entre dans la ville sur un plateau surplombant la Loire et traverse Tours sur une longue méridienne nord-sud sur près de sept kilomètres.
Il est impossible de trouver une place de parking en ville, surtout avec un camping-car. Que faire alors ? Sur Google Maps, je cherche le terminus de l'unique ligne de tramway de Tours et m'y rends le lendemain matin. Ici, à la périphérie de la ville, il y a des places de parking sans problème et en une demi-heure, je suis en plein centre-ville avec le tram. C'est parfait.




Après l'agitation de la ville, la basilique Saint-Martin est un bel endroit pour s'arrêter quelques minutes et profiter du calme. Le temps d'une méditation ou d'une prière. La visite du tombeau de Saint Martin est plus qu'impressionnante.
Selon la légende, c'est vers 338 que s'est produit ce qui a rendu Martin célèbre dans le monde entier : à la porte de la ville d'Amiens, Martin, soldat à cheval, a rencontré un mendiant transi de froid auquel il a donné la moitié de son manteau qu'il avait partagée avec son épée. La nuit suivante, le Christ lui serait apparu en rêve, vêtu de ce morceau de manteau : C'est lui qui aurait mis Martin à l'épreuve en tant que mendiant. Qui ne connaît pas cette histoire de sa jeunesse !

Après Tours, le paysage s'élargit, le ciel est bas, la lumière très particulière de la vallée de la Loire enchante la région. Les champs de colza ne sont plus d'un jaune aussi éclatant, mais les premiers champs de coquelicots apparaissent. Le printemps avance.

La Route Nationale 10 (la signalisation alterne constamment entre N10 et D910, puis D810) prend un autre visage, elle semble plus "soignée". Et le premier panneau d'une association qui s'occupe de la pérennité historique de l'itinéraire fait également son apparition : "Nostal'10". L'association a été créée en 2015 pour promouvoir le patrimoine et la mémoire de l'ancienne route nationale 10. Au programme, par exemple, des rassemblements dominicaux de voitures anciennes des années 1950 et 1960 sur le site de l'ancienne station-service à la sortie sud de Sainte-Maure-de-Touraine. Ou encore l'organisation de bouchons planifiés avec des voitures anciennes, à l'image de l'Embouteillage de Lapalisse sur la Route Nationale 7.

Les propriétaires de l'aire de repos des Deux Croix, située sur la route nationale 10 au sud de Sainte-Maure-de-Touraine, décidèrent de construire une station-service qui fut achevée début 1956. Elle possédait une architecture remarquable, très moderne, dont les lignes rigoureuses étaient inspirées des stations-service américaines. Après la construction de l'autoroute A10 en 1977, le trafic sur la route nationale 10 a inexorablement diminué et les vestiges de la station-service se sont rapidement dégradés. Jusqu'à ce que l'association "Nostal'10" s'en occupe. Les plus gros dégâts de construction ont été réparés et le bâtiment a été repeint. Entre-temps, elle a même été classée monument historique.


La Nationale 10 vient de parcourir son 300e kilomètre depuis Paris ... je suis arrivé à Châtellerault. Une petite ville de province tranquille et sans histoire au bord de la Vienne. Une petite balade, un café rapide.

Juste avant que la RN10 n'atteigne Poitiers, j'arrive au Futuroscope, un parc de loisirs qui dispose même de sa propre gare TGV. Le Futuroscope a été élu meilleur parc de loisirs d'Europe aux "Parksmania Awards" et meilleure attraction d'Europe à "L'extraordinaire Voyage". Il présente les technologies médiatiques fascinantes du futur et propose plus de 25 attractions, dont des cinémas 3D, des jeux d'eau, une cyber-avenue, la tour d'observation Gyrotour de 45 mètres de haut (vue panoramique à 360° sur le parc) et un centre multimédia avec des jeux virtuels. Il vaut donc vraiment la peine d'être vu ... si l'on aime ce genre d'attractions. Je n'en fais pas partie ! Je laisse le parc sur ma droite, Poitiers m'appelle !


J'arrive à Poitiers, la capitale du Poitou, dans la vallée du Clain, une petite rivière qui borde la ville. Quel que soit le parking choisi, il faut toujours gravir la haute crête sur laquelle trône la belle cité pour accéder à la vieille ville, une ascension longue et raide. Arrivé en haut, le centre est étonnamment à taille humaine.
Au début du Moyen Âge, Poitiers était un haut lieu du christianisme, ce qui lui a valu le surnom de "ville dorée". Aujourd'hui, la ville n'est plus "dorée", mais je peux encore admirer une architecture chrétienne d'une beauté impressionnante. Poitiers déborde de charmantes ruelles et de places animées, de boutiques accueillantes, de restaurants et de terrasses de cafés. Ici, je peux rester des heures devant un verre de pastis, observer "ma" France et me sentir bien. De nombreuses maisons à colombages et patriciennes se trouvent sur le chemin. Poitiers est tout simplement magnifique !



La principale curiosité du centre historique, l'église Notre-Dame-la-Grande, datant des XIe et XIIe siècles, est un témoignage remarquable de l'art roman. Elle est une preuve importante de l'art roman avec sa magnifique façade sculptée du XIIe siècle. siècle. Et un intérieur magnifique. Je ne me lasse pas de la voir !




Le trajet de Poitiers à Angoulême est malheureusement assez ennuyeux. La N10 mène vers le sud sur quatre voies. Tous les hameaux et petites villes qui se trouvent sur le chemin sont contournés sans exception. C'est bien pour les habitants, mais inintéressant dans ma quête nostalgique. L'ancienne voie a été complètement absorbée par la voie rapide, il n'y a que très peu d'endroits où il y a encore des départs. Près de Ruffec, je découvre tout de même une ancienne station-service. Elle n'est plus en service.

Quelques rares vieilles stations-service le long de la route me ramènent des décennies en arrière. Certaines ont été rénovées, d'autres sont abandonnées ou meurent lentement. Les réservoirs des voitures des glorieuses années soixante allaient de 20 litres pour une 2 CV à 50 litres pour une Peugeot 404, sans parler de plus de 60 litres pour les Citroën DS et Simca Vedette. Mais ces consommations parfois vertigineuses faisaient de la station-service une halte régulière sur les longs trajets.
Que seraient les villes françaises sans leurs cathédrales ? Mais Angoulême se distingue par le fait qu'elle possède une cathédrale romane du 12e siècle et non gothique, comme tant d'autres villes françaises.
Les ruelles étroites et pavées de la vieille ville sont bordées de charmantes maisons à colombages et de bâtiments Renaissance. Se promener dans ces ruelles pittoresques est comme un voyage dans le passé.
Mais Angoulême a aussi de la modernité à offrir. C'est la capitale de la bande dessinée. Si vous vous intéressez à cette forme d'art, ne manquez pas de visiter le musée de la bande dessinée !



Dans les années 1950, l'écart entre le nombre de véhicules et la capacité du réseau routier français à les accueillir était flagrant. La troisième semaine de vacances introduite en 1956 et la fermeture de la plupart des entreprises pendant les vacances d'été au mois d'août ont eu pour conséquence que des milliers d'automobilistes se sont retrouvés coincés dans les embouteillages sur les grands axes routiers. La route nationale 10 ne fait pas exception à la règle et les bulletins d'information des stations de radio ne cessent de citer des points noirs qui ralentissent, voire bloquent, le trajet des vacanciers vers l'Atlantique. Chartres, Vendôme, Montbazon, la côte basque : des cauchemars pour les automobilistes. Les moteurs des voitures étaient en surchauffe, les nerfs des conducteurs mis à rude épreuve.

Conscient que la situation se reproduira l'année prochaine, le gouvernement prend des décisions importantes. Il s'agit d'inciter les automobilistes à différer leur départ afin de répartir les flux de circulation. C'est ainsi qu'est né fin juin 1976 "Bison Futé", un sympathique indien destiné à guider les vacanciers sur les routes françaises. Une grande campagne publicitaire a été mise en scène avec de véritables cavaliers indiens sur les bords des routes et dans les pâturages, sous la surveillance de motards de la gendarmerie. Aujourd'hui encore, "Bison Futé" est le service national de la circulation. *

* Le premier week-end d'août 1975, les routes de France sont totalement engorgées. Les embouteillages sont interminables, 60 000 voitures sont immobilisées. Le gouvernement décide alors de mettre en place un dispositif pour aider les automobilistes dans leurs trajets. Un an plus tard, Bison futé est créé. C'est le centre national d'information routière. Des gendarmes analysent en direct les conditions de circulation sur toutes les routes de France.
Pourquoi s'appelle-t-elle Bison futé ? Pour accompagner les automobilistes, il fallait trouver une mascotte. On a d'abord pensé à un dauphin, vif et intelligent, puis à une girafe, qui domine la situation avec son long cou, et enfin à un lapin... Finalement, c'est le petit Indien qui a remporté la course. En effet, il est considéré comme débrouillard et habile. De plus, il connaît parfaitement son territoire et sait s'orienter. Et pourquoi Bison futé ? Le bison est fort, courageux et intelligent !
Sur le site de Bison futé ou dans l'APP, chacun peut s'informer sur les conditions de circulation sur les routes de France.

Après Angoulême, la route nationale 10 tourne brusquement vers le sud-ouest et se rapproche de l'Atlantique, qui n'est plus qu'à 100 kilomètres. La route historique est enterrée sous la voie rapide. Au milieu des vignobles où l'on cultive du raisin pour le cognac et le pineau, la route devient plus raide et certains passages sont dignes des montagnes russes. Les vignobles sont omniprésents à gauche et à droite de la route, Il n'y a presque plus de traversées de villages, la RN10 est à 4 voies et tend vers Bordeaux. Mais je dois encore traverser la Dordogne et la Garonne, tandis que la route serpente à travers les vignobles bordelais. La Dordogne fait ici près de 400 mètres de large et est marquée par de forts courants en raison de la proximité de son confluent avec la Garonne.
En 1966, dans le cadre d'une enquête sur l'état des routes nationales et notamment de la RN 10, plusieurs journalistes écrivaient à propos de Bordeaux : "avis unanime, il s'agit de la pire agglomération de toute la France, nombre record d'accidents à Bordeaux". L'incomplétude de la liaison Paris-Bordeaux-Espagne depuis le début du XXe siècle n'a été corrigée qu'avec la rocade, mise en service progressivement entre les années 1970 et 1980.
Bordeaux est l'un des points forts de ce voyage. Une grande ville remarquablement belle avec des rues élégantes et des places monumentales, une belle promenade le long de la Garonne et des petites ruelles entrelacées.
Je réserve une place au camping Beausoleil, au sud de la ville, et me rends au centre en une demi-heure en bus et en tram. Avec le camping-car, c'est une entreprise désespérée. Et ... le camping se trouve exactement sur l'ancienne Route Nationale 10 !








La route nationale 10 commence après Bordeaux par la traversée d'un immense centre commercial qui n'est pas moins peu attractif que tous les autres centres commerciaux situés en périphérie des métropoles. Les "hypers" et les "bricos" ont remplacé les prairies et les platanes qui bordaient autrefois la route. Il ne reste que quelques petites maisons des années 1950 et 1960, entre un supermarché et un fast-food.
A la sortie de Gradignan, la N10 passait au milieu d'un ancien prieuré ! Le couvent de Cayac comprenait une église, un hôpital et un cimetière où les religieux et les pèlerins, souvent morts d'épuisement, trouvaient leur dernière demeure.

Ceux qui venaient de Bordeaux devaient prendre un virage serré après le petit pont sur l'Eau Bourde avant de pouvoir se faufiler dans le passage de seulement cinq mètres de large entre les bâtiments du monastère. Ceux qui venaient de Bayonne étaient déconcertés par ce véritable gouffre, d'autant plus qu'ils avaient parcouru jusqu'ici plus de 30 kilomètres sur une route rectiligne. À cet endroit, les bâtiments étaient régulièrement endommagés par le passage des poids lourds. Malheureusement, les accidents les plus graves se produisaient régulièrement : Des camions se sont renversés, des autocars ont eu des accidents, de nombreux morts ont été à déplorer.

La route nationale 10 n'existe plus dans les Landes, elle est désormais sous l'autoroute, qui est même payante par endroits depuis 2013. Mais à y regarder de plus près, cette longue diagonale qui s'étend toujours plus au sud-ouest semble irrésistiblement attirée par l'océan, dont la proximité se fait sentir à chaque kilomètre parcouru.
Pour trouver et parcourir la route historique, je dois prendre chaque sortie et entrée d'autoroute pour arriver aux villages et petites villes abandonnés il y a 40 ans.

En 1968, une équipe de télévision a réalisé un reportage sur un original local de Magescq, sur la route nationale 10, qui passait le plus clair de son temps sur le bord de la route à regarder les voitures passer, tandis qu'il tricotait des pulls, des écharpes et des gants pour les clients des environs. D'année en année, il recevait la visite de touristes qui lui commandaient des tricots. La rumeur veut que le jeune prince Charles d'Angleterre lui ait commandé un pull-over lorsqu'il était en vacances à Biarritz. Personne ne sait si le pull-over royal a été récupéré.

Et Martine, jeune fille à l'époque, se souvient dans ce documentaire : "La circulation n'était pas la même qu'aujourd'hui et en été, nous allions parfois tricoter sous les arbres avec des amies pour voir passer les nouvelles voitures".
Après avoir traversé le Fort Landaise sur une centaine de kilomètres, la Route Nationale 10 s'approche de l'Atlantique en formant un angle plat. L'océan n'est plus un mirage, il est là, à quelques centaines de mètres de la route. Le Pays basque me tend les bras, l'arrivée est proche, même s'il reste encore une soixantaine de kilomètres à parcourir - pas forcément les plus faciles ...
Le trajet vers Saint-Jean-de-Luz via Bayonne, Anglet et Biarritz prend du temps et met les nerfs à rude épreuve. Ces villes sont devenues un seul et même moloch. La circulation est terrible, hier comme aujourd'hui. Les belles villes compensent à peine la recherche interminable de places de parking. On ne voit plus rien de la route nationale 10. Les plus pressés iront plus vite sur l'autoroute toute proche.


La fin du voyage est proche, la Nationale 10 atteint le dernier département français avant la frontière espagnole. Les 30 derniers kilomètres sont aussi les plus attendus par les vacanciers. L'Atlantique se montre enfin depuis la route. Le paysage est l'un des plus beaux de l'itinéraire de la Nationale 10.

Seule commune située entre Bayonne et Biarritz, Anglet a bénéficié de l'expansion des deux villes voisines depuis le milieu du XXe siècle. La plage de la Chambre d'Amour, longue de 4 km, a accueilli en 1854 les premières stations balnéaires de la Maison de l'Empereur. Napoléon III et l'impératrice Eugénie participèrent activement à la création de la station balnéaire d'Anglet, qui précéda même de peu celle de Biarritz. Les bains de mer étaient devenus à la mode et ne devaient plus jamais cesser.

En 1963, le premier club de surf a ouvert ses portes sur la même plage de la Chambre d'Amour, alors que la côte était envahie par les vacanciers. Le trafic sur la route nationale 10 augmenta fortement et des campings s'installèrent le long de la route. En 1963, le camping de Saint-Jean-de-Luz, accessible par la voie d'accès d'une station-service Esso, faisait payer 1,10 francs par personne et 55 centimes par véhicule pour une nuitée. Les gourmets se rendaient à la même époque au Relais de Parme, un restaurant classé deux étoiles sur la liste des meilleurs restaurants du monde.



C'est la dernière étape, la fin de ce long voyage. L'odomètre indique plus de 760 kilomètres. La RN 10 se termine par deux itinéraires différents. Les plus pressés resteront sur la RN 10 jusqu'à la frontière à Biriatou. Les amateurs de paysages et de panoramas à couper le souffle choisiront la RN 10c, qui suit la corniche basque jusqu'en Espagne. Dans tous les cas, ces derniers kilomètres sont une juste récompense pour le voyage.


Sur les rives de la Bidassoa, la Route Nationale 10 en Espagne devient définitivement la N-1, la Carretera Nacionale 1, son pendant espagnol qui mène jusqu'à Madrid ou qui est l'un des points de départ du chemin de Saint-Jacques en Espagne. Mais c'est une autre histoire.


